SURVIVANT? (Ep 8)

SURVIVANT? (Ep 8) | AfroRaise

Le professeur s'apprêtait à faire son interrogation éclaire quand il remarqua l'absence de son meilleur élève, Richard GALLE

 

>Il est où ? Demanda-t-il tout bas à sa camarade de banc.

 

>Je ne sais pas monsieur, je ne l'ai pas vu après la récréation.

 

>BIEN, L'INTERROGATION SERA POUR UNE PROCHAINE FOIS. NOUS ALLONS PLUTÔT AVANCER EN HISTOIRE. NOUS SOMMES EN RETARD DANS LE CHAPITRE SUR LA PREMIÈRE GUERRE MONDIALE, lança le professeur au grand soulagement de l'assemblée.

 

>Il paraît que vous étiez photographe reporter lors de la première guerre mondiale, lança le métis du fond de la salle.

 

Toute la classe explosa de rire, même Eugénie qui plaça sa main sur la bouche pour se contenir.

 

>Peut-être voudriez-vous nous raconter quelque chose sur la première guerre mondiale sur un papier, répliqua le professeur énervé.

 

Toute la classe se tut en une seconde au point où l'on pouvait entendre les mouches voler.

 

>Monsieur Sylvestre MERLOT, mettez-vous debout pour une interrogation orale sur vingt, lança le professeur au métis...

 

Le temps passa, la deuxième récréation se présenta aussi vite que le chaud soleil annonçant midi.

Courbé sur les herbes, houe à la main, il vit deux pieds sortir de nulle part, s'arrêter à côté de lui. Il devina aux chaussures coûteuses que ce n'était personne d'autre que Sylvestre.

 

>Dis-moi comment tu fais. Tu sarcles si bien qu'on aurait dit que tu es fait pour ce travail. Comment tu fais ? Demande-t-il en riant de son camarade qui accomplissait sa punition.

 

Le condamné se redressa, sueur sur le front, uniforme collé à la peau à cause de la transpiration, dos et aisselles mouillés. Il passa son avant-bras sur son front pour le débarrasser de la sueur qui lui entrait dans les yeux. Il l'ignora et s'abaissa de nouveau pour continuer d'arracher les mauvaises herbes enracinées.

 

>Tu le fais si bien. Attends c'est comme ça ? En se plaçant à côté de lui et en l'imitant. Non, comme ça, tu remues les reins comme ça, oui comme ça, fit-il en se dandinant à côté de lui. Et un deux, un deux, un deux, un deux…

 

Exaspéré, il donna un coup de  houe dans le sol à quelques centimètres des pieds de Sylvestre. Ce dernier sursauta de frayeur. Il se redressa et le fixa d'un regard glacial et menaçant. Il serra le poignet en bois de la houe comme s'il s'apprêtait à pourfendre le crâne de son camarade.

 

>Tu es malade toi, dit-il en reculant de peur, on devrait t'interner à l'asile.

 

>IL Y A QUEL PROBLÈME LÀ BAS ? Lança le surveillant qui était à l'extérieur du vaste terrain.

 

>AUCUN, lança Sylvestre. Profite bien du chaud soleil et de la compagnie des herbes. Tu l'as bien mérité pour ce que tu m'as fait dit-il à Richard avant de se re retourner.

 

 

Il le voyait s'en aller avec sa démarche pleine de suffisance et d'arrogance. Le soleil lui frappait dans les yeux et lui brûlait la peau, il était fatigué mais il se devait de faire le maximum, il a son premier TD à donner. Il plaça une main à hauteur de ses yeux et vit au loin Sylvestre sortir un billet et le remettre au surveillant qui l'empocha.

 

 

>Le  crétin, lâcha t-il. Je comprends pourquoi il ne m'a pas ordonné de retourner en cours.

Richard continua de sarcler deux bonnes heures jusqu'à la fin des cours annoncée par le gardien du temps. Il se redressa d'une manière vive faisant claquer sa hanche dans une monstrueuse douleur. Il avait oublié le phénomène d'habitation des hanches. Il plaça une main sur ses hanches et voulut s'abaisser, chose impossible. Plus il faisait l'effort, plus il avait mal.

Richard vit trois silhouettes s'approcher.

 

Arthur : Je me doutais bien que tu ne pouvais être qu'ici, dit-il en arrivant en premier.

 

Romuald : T'as grave la chance toi. Tu as failli louper une interrogation. Heureusement, Sylvestre qui n'a pas pu s'empêcher de l'ouvrir s'est pris une interrogation orale en pleine face.

 

Richard : C'était le cours d'anglais ?

 

Romuald : Non, histoire-géographie.

 

Eugénie : … silencieuse et furieuse, les bras croisés sous la poitrine.

 

Arthur : Tu as déjà fini tout le terrain ? S'étonna Arthur en jetant un œil sur le terrain.

 

Richard : Eugénie je…

 

Eugénie : Je te comprends, dit-elle en levant la main pour le couper court.

 

Romuald : Il a de sacrées hanches ce gars, dit Romuald en lui tapotant les hanches.

 

Une douleur vive se saisit des hanches de Richard, le faisant grincer des dents.

 

Romuald : Quoi ? Dit-il en retenant un coup. Ne me dit pas que tu as aussi sarclé ta hanche.

 

Richard : Non, je me suis brusquement relevé et j'ai l'impression que ma hanche est coincée depuis.

 

Eugénie : Tu es sûre que ça va aller ?  Reprit Eugénie inquiète.

 

Richard : Oui oui, ça va tant que je ne m'abaisse pas. Allons, je reviendrai demain ramasser les mauvaises herbes. Le TD c'est dans moins d'une heure.

 

Romuald : On l'aide à finir en même temps. Dit-il à ses camarades. Avec nous trois ça ira plus vite. .

 

Arthur : Oui, tu as raison. Eugénie s'il te plaît apporte nous quatre râteaux. Romuald et moi on va chercher les poubelles.

 

Richard : Merci les amis, dit-il alors qu'ils l'avaient déjà quitté.

 

Ils ramassèrent les mauvaises herbes déracinées d'avance par Richard et les enfouirent dans les grandes poubelles qu'ils vidèrent plus d'une dizaine de fois à la décharge de l'école publique. En une trentaine de minutes le terrain fut propre comme si un ouragan était passé dessus.

 

>Prends, ça va calmer tes maux de hanche. Je le prends souvent quand je ne supporte plus les douleurs de mes menstrues, dit Eugénie une fois en classe.

 

>Beurkk, fit Romuald qui nettoyait le tableau.

 

>Ces comprimés contiennent souvent des analgésiques contre la douleur, alors calme-toi, reprit Richard avant d'avaler les pilules qu'il mouilla dans un peu de salive

 

Arthur : Tiens, voilà mon ancien cahier de mathématiques

 

Eugénie : J'ai aussi apporté pour les sciences physiques et les sciences naturelles.

 

Richard : J'en ai pas besoin, répondit-il confiant.

 

Arthur : Bien-sûr que si ! Tu dois t'inspirer des mots que le prof avait utilisé pour parvenir à expliquer.

 

Eugénie : Si tu utilises les formules de Terminal ou je ne sais quoi tu risquerais de les embrouiller.

 

Arthur : Aujourd'hui on a programmé les classes de Secondes scientifiques.

 

Richard : Ok d'accord.

 

Une dizaine de minutes plus tard les premiers élèves arrivèrent en saluant Richard qui s'assit sur la vielle table, presque en miette, de la classe. Il ne savait pas pourquoi ils avaient choisi cette ancienne classe isolée de l'établissement mais il n'avait pas voulu demander.

 

La première séance se termina mieux qu'ils l'avaient imaginé. Les élèves furent plus nombreux que prévu. Ils étaient tous impatients de la prochaine séance. Eugénie et ses deux camarades restèrent au fond de la classe observant Richard dispenser les explications. Elle le trouvait plus séduisant et plus intelligent malgré la tâche sombre faite dans les aisselles de son uniforme par la transpiration. Arthur prenait note, on ne savait pas quoi. Il avait observé les regards étincelants d'Eugénie mais n'avait dit mot.

 

>Passe-moi l'argent, dit Eugénie en tendant la main à Romuald qui s'était chargé de la collecte.

 

>Pardon ? Reprit Romuald qui n'avait pas compris mais qui priait qu'elle ne le répète pas.

 

>Passe-moi l'argent que tu as collecté, reprit Eugénie avec un regard froid à glacer le sang

Les garçons se regardaient tour à tour, ne comprenant pas l'intention d'Eugénie. Romuald n'avait aucune envie de voir apparaître sur son visage cet regard qui lui faisait toujours froid dans le dos.

 

>Il faut bien que quelque fasse les comptes non ? Dit-elle en les regardant étonnée par leurs réactions

 

>Ah ! Fit Romuald en lui versant l'intégralité des pièces dans les mains.

 

Elle les récupéra et s'assit au premier banc.

 

Régina : Il y avait trente six élèves, je ne vois que trois mille cinq cents ici, un élève n'a pas payé ? Demande-t-elle à Romuald.

 

Romuald : Faut voir avec Richard, c'est lui qui l'a autorisée à suivre.

 

Richard : Tu peux faire le compte sans les cents francs restant. Elle m'a dit qu'elle n'avait pas de quoi payer mais qu'elle avait envie de suivre.

 

Romuald : Ce n'est pas une raison je trouve. Et si tous disaient la même chose ? Nous ne faisons pas une œuvre de charité.

 

Richard : Fhhum, fit-il en s'asseyant sur le rebord d'un banc. Je connais ça ! Ce que ça fait quand on organise un concours auquel tu aimerais participer mais tu n'as pas les moyens de payer les frais de participation. Certains de tes camarades y vont et ils reviennent narrer les évènements, et toi hypocritement, perfidement tu souris avec eux, tu feins d'être content pour eux alors que tu les envies, tu te dis tu aurais aimé participer, que tu n'allais pas gaspiller les frais de participation, tu ferais tout pour gagner. Ce que ça fait quand tu n'as pas d'argent pour avoir un répétiteur ou même suivre les TD que les professeurs organisent. Tu restes caché à l'extérieur, tu prêtes une oreille attentive à ce qu'il dit, et quand ils finissent tu cours te cacher pour que les autres ne se moquent pas de toi, et tu répètes cela chaque semaine, tu es harassé, reclu, rétamé par cette situation mais tu n'as pas le choix, pourtant tu es le meilleur de tous. Juste que tu n'as pas l'occasion de saisir les opportunités que les autres laissent passer.

 

Le silence régna en maître pendant plusieurs secondes. Ils semblaient profondément touchés par le récit de leur ami.

 

Arthur : C'est celle qui levait le doigt à toutes tes questions ?

 

Richard : Oui, Judith. Dites ce que vous voulez mais tant qu'on fera les TD, elle ne payera pas un rond.

 

Eugénie : Je te comprends, dit-elle en retenant une larme.

 

Elle sort sa calculatrice et entame les comptes. Ils la regardèrent s'activer comme si elle l'avait toujours fait.

 

Eugénie : trois mille cinq cents fois quinze pourcents donnent cinq cents vingt cinq. Romuald et Arthur, vous prenez mille cinquante, dit-elle en s'adressant à eux. Richard, les deux mille quatre cents cinquante restants sont pour toi. N'oublie pas qu'il faudra payer de la craie et un effaceur. Le papier mouchoir ne servira pas tout le temps.

 

Richard : D'accord. Et toi ? Tu prends combien ?

 

>Non mais il peut pas la fermer ? Murmura Romuald à Arthur. On ne l'avait pas prévu dans le partage.

 

Arthur poussa son visage qui était un peu trop près du sien.

 

Eugénie : Non je ne prends rien, je suis là pour aider. Je t'ai entendu Romuald, dit-elle en se retournant vers lui avec un sourire hérétique.

 

Richard : D'accord. Merci. Je pense qu'il faudra qu'on augmente les jours. Trois jours dans la semaine ne suffiront pas, ils demandent plusieurs séances. Je propose qu'on le fasse tous les jours.

 

Romuald : Je suis partant, dit-il surexcité. On se fera plus de fric.

 

Arthur : Je suis partant également. Tant que c'est les soirs.

 

Eugénie : Les vendredis, samedis et dimanches je ne serai pas disponible.

 

Richard : Ok d'accord, ça se comprend.

 

Arthur : Il va falloir faire quelques ajustements. C'était la première séance, tu t'es pas mal débrouillé.

 

Richard : Lesquels ?

 

Il ouvrit son carnet de note et le feuilleta

 

>Il va d'abord falloir que tu prennes un habit de rechange pour les prochaines fois. Ils savent que tu es un élève mais ça diminue ton autorité et ta persuasion sur eux. Deuxièmement ta voix, il faut modeler tes cordes vocales pour que toute la classe arrive à t'entendre. Tu l'as remarqué que certains te répétaient qu'ils n'écoutaient pas. Il va falloir que tu travailles ton côté stress.

 

>Je n'étais pas stressé, repris Richard.

 

>Tu répétais plusieurs fois les mêmes mots et tu te perdais dans tes phrases, nous savons tous ici que c'est très rare venant de toi.

 

>Ok d'accord, j'y travaillerai.

 

>Demain on fera un essaie pour la gestion de ton stress.

 

>Toi tu t'y connais en gestion de stress ? Questionna Romuald.

 

>Je fais partie du club de représentation théâtrale de notre église, donc oui.

 

>Les garçons, il faut qu'on s'en aille, dit Eugénie qui vit l'heure sur son téléphone.

 

Celui d'Arthur sonna.

 

>C'est Josiane, sûrement qu'elle me cherche.

 

>Monsieur l'amoureux, dit ironiquement Romuald.

 

>Personne ne t'a demandé de l'ouvrir. Tonna Arthur d'une voix froide. À demain les amis.

 

Quelques heures plus tard Richard était au milieu de ses petits frères qui croquaient dans les biscuits, qui leur avait payé, en traitant leurs exercices sur les tabourets en guise de table. Ils s'étaient assis à proximité du lampion qui éclairait faiblement le minuscule salon et en profitait pour dégager une importante chaleur.

 

Mme GALLE : Bonsoir tout le monde, fit-elle accompagnée de Rolland qui lui tenait sa marchandise.

 

Les enfants laissèrent aussitôt leurs cahiers et biscuits et sautèrent sur leur mère comme à l'accoutumée.

 

Mme GALLE : Qui vous a payé les biscuits ? En remarquant les emballages sur le sol

 

RAÏSSA : Maman c'est Richard.

 

Richard : Bonne arrivée maman, c'est moi.

 

Mme GALLE : Où as-tu trouvé le billet que tu as en main ? Dit-elle en se libérant des enfants.

 

Richard : J'ai fait un TD à un groupe d'élèves de Secondes dans mon établissement. Des amis m'ont aidé.

 

Mme GALLE : Tu aurais dû m'en parler avant.

 

Richard : Oui je sais mais, je ne savais pas si ça allait tenir.

 

Mme GALLE : D'accord. Ça s'est bien passé ?

 

Richard : Oui maman.

 

Mme GALLE : C'est bien que tu mettes ton intelligence au service de tes jeunes frères. Ton père aurait été fier de toi, dit-elle avec un sourire aux lèvres.

 

Richard : Pourquoi Rolland sourit seul depuis votre arrivée ? Questionna Richard qui remarqua que son grand frère était animé d'une joie inhabituelle

 

A SUIVRE…

ECRIT PAR PRIVAS_WINNER

 

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