LE TRIANGLE AMOUREUX

- Approche espèce d’imbécile si tu as des couilles ! Que je te tranche la gorge !
Je m’appelle Amavi. Âgée de vingt-cinq ans, je suis étudiante en troisième année en faculté des sciences à l’université de Lomé.
Mes parents sont à l’intérieur du pays. Ma mère fait un commerce de poisson fumé et mon père est un charpentier. Les débuts en ville ont été un peu difficiles pour moi mais avec le temps j’ai réussi à m’habituer. Je ne saurai pas y arriver sans l’aide de Koffi.
C’était un vendredi soir où je rentrais à la maison mon petit cartable à la main. Un homme dans la trentaine assis sur une moto me fit signe d’approcher. Je ne suis pas du genre à parler aux inconnus surtout si ces derniers ont l’intention de courtiser. Je le dépassai donc en lui étant indifférente mais il me suivit et me supplia de lui accorder une minute. Ce que je fis. Il se présenta et demanda mon nom et numéro de téléphone. Nous avions commencé à échanger via messagerie. Il me fit part de ses réelles intentions ; celle d’être en couple avec moi.
Quelques semaines plus tard, il a commencé à me rendre visite et à insister pour que je lui donne une réponse favorable. Mais à vrai dire, il ne m’attirait pas et de plus il était très âgé que moi. Mes parents ne pourraient jamais tolérer un truc pareil. Je lui répondis finalement « non ». Nous étions donc devenus de bons amis.
Le temps a passé et Koffi ne digérait pas le fait d’être mon ami. Il en voulait plus. Selon lui, chaque personne a sa chance. Peut-être un jour, je finirai par tomber amoureuse de lui. Pour cela, il m’offrait des petits cadeaux et même me donnait de l’argent par semaine que j’acceptais sans hésiter car selon un adage africain, le chat ne refuse jamais le poisson à moins qu'il soit rassasié.
Ma famille eut des problèmes financiers. Mes parents ne pouvaient plus me payer les études ainsi que celles de mes frères. Même le manger devenait difficile à trouver. Pour ne pas rester sans rien faire, je me mis à la recherche de petits travaux qui pourraient subvenir à mes besoins quotidiens mais la plupart était déjà pris et ceux qui ne l’étaient pas étaient conditionnés par « coucher avec le responsable ». Je me recroquevillai alors dans mon coin en attendant que la galère me submerge.
Koffi passa un soir. Je lui racontai mes soucis. Il me propose de l’aide ; payer mes études et doubler mon argent de poche. Je ne pouvais refuser une pareille proposition vu l’état dans lequel je me trouvais alors, j’acceptai.
Petit à petit je prenais Koffi au sérieux. Un soir, je me laissai à lui et nous avions couché ensemble. Suite à cela, il me raconta son histoire qui me rendit triste. Il avait une femme et un enfant dans sa vie. Cette dernière ne s’intéresse moins à lui et au gosse. Elle passe la plupart du temps dans les bistros et les discothèques en compagnie d’hommes. Malgré les interventions des membres de sa famille, la situation était restée inchangée. Alors, il se décida aussi de voir ailleurs. Dès qu’il posa les regards sur moi, il avait senti un coup de poing dans la poitrine.
Je me suis beaucoup posée de questions après que Koffi m’ait tout raconté. C’est vrai qu’il m’a beaucoup aidé mais je ne me vois pas prendre la place d’une autre femme et élever son gosse. Je suis venue à l’université pour étudier et décrocher mon diplôme; trouver un emploi et s’occuper de ma pauvre famille ensuite. Tel est mon objectif. Alors je lui ai clairement fait comprendre que c’était impossible nous deux. Il s’est mis en hargne et m’a quitté sans rien me dire. Quelques semaines plus tard, il revient m'annoncer qu’il a rompu avec sa femme pour moi et que je dois m’engager pour de vrai avec lui. J’ai de nouveau rejeté sa proposition tout en étant franche mais il est devenu possessif et Parano. Je le renvoyai de chez moi.
Plus tard, je rencontrai un jeune homme. Il s’appelle Kodjo. Je ne me sus pas à quel moment je tombai amoureuse. Etant au courant de ma situation, il me prit également en charge. Je décidai alors de tirer pour de bon un trait sur Koffi après lui avoir parlé.
Un soir, lorsque nous étions ensemble, Koffi débarqua sur nous dans la chambre avec autorité comme s’il était propriétaire des lieux. Il alla directement se coucher sur le lit sans saluer personne. Kodjo, très furieux me demanda des explications. Je réussis d’abord à le calmer. Quant à Koffi, je l’amenai dehors pour discuter avec lui. Selon ses dires, il a beaucoup fait pour moi donc ne peut pas me laisser pour un autre ; pire, il a chassé sa femme et abandonné son enfant pour moi. Mais est-ce ma faute ?
Les problèmes ont commencé avec Kodjo. La complicité qui existait entre nous deux auparavant a disparu. Il devenait de plus en plus distant et cela m’embarrassait. Si et seulement si je lui avais parlé de Koffi, rien de cela ne serait arrivé. Koffi commença de nouveau à me rendre visite. Et quand il vient, même en présence de Kodjo, il s’installe confortablement. Que faire dans une situation pareille ? Je n’ai pas aussi assez d’argent pour déménager. Certains de mes amis m’ont conseillée de déposer une plainte contre lui mais je me rappelle de tout ce qu’il a fait pour moi et je n’aimerais pas paraitre ingrate.
Après avoir discuté avec Kodjo, il décida de passer l’éponge sur cette histoire et promit me louer un autre appartement à la fin du mois. Tout était redevenu normal entre nous.
Un samedi aux environs de vingt-deux heures, Kodjo et moi regardons la télévision. L’on frappa à ma porte. J’allai ouvrir. C’était Koffi. Il me poussa violemment et entra avec une certaine fureur. Il sauta sur Kodjo et le roua de violents coups de poings. Il le traina dehors et le cogna jusqu’à ce que ce dernier s’effondre à terre. Tous les voisins étaient absents. Malgré mes cris et supplications, Koffi ne le lâchait pas. Il le frappa de nouveau. Une force inestimable envahit Kodjo et il le retourna. Il le cogna aussi violemment. Koffi sortit un poignard de sa poche.
- Approche espèce d’imbécile si tu as des couilles ! Que je te tranche la gorge cria-t-il.
- C’est plutôt toi qui n’as pas de couilles, idiot ! La jeune femme ne veut plus de toi, pourquoi ne nous laisses-tu pas vivre tranquillement ? Elle m’appartient maintenant. Dégage d’ici !
- C’est ton cadavre que je trainerai dehors. Cette nuit, l’un d’entre nous y laissera sa peau.
- Eh bien tu auras ce que tu mérites.
Koffi lança son premier coup de poignard mais Kodjo le feinta en le lui prenant et l’enfonça directement dans la colonne vertébrale. Koffi se retrouva au sol dans tous les états, agonisant. Du sang sortait abondement de son corps et de sa bouche aussi. Il décéda sur le champ.
Que feriez-vous à la place de Kodjo ?
Ecrit par Koffi Verdo Lompiol