AU PRIX DE MON ÂME (Ep 3)

AU PRIX DE MON ÂME (Ep 3) | AfroRaise

   CYNTHIA

 

Je suis sortie de là en réfléchissant, la tête baissée, je descendis des escaliers. Tout mon être repensait à ces quelques mots que mon directeur m’avait dits. C’est comme cela la vie ? c’est comme cela qu’on se cherche après les diplômes ? l’intelligence et le travail abattu ne suffisent-ils pas pour avoir un bon boulot ? pour se sentir épanouie ? J’aurais vraiment aimé que mes parents soient riches… on disait avant qu’après le bac je ferai ci et ça et après on s’était dit que non, ce serait après la licence. Voilà qu’après la licence même, c’est toute une autre vie.

 

Pim pim pim, je cours me réfugier à gauche de la route quand cette voiture klaxonna, je ne savais pas que je marchais au beau milieu de la rue. Mes pensées sont ailleurs, Je ne peux ne pas m’empêcher de réfléchir.

 

Un sms me fait sortir de ce monde où je me sens totalement seule et triste… c’était ma seule et meilleure amie

 

-Elvire : « dis-moi quelque chose »

 

-Moi : « je suis épuisée »

 

-Elvire : « stp chérie… »

 

-Moi : « je viens chez toi »

 

Je me suis dit que j’allais marcher jusqu’à chez Elvire juste pour me détendre. Juste en marchant, quelqu’un me dépasse en recevant un appel ;

 

-Lui : oui oui… ce n’est pas de la blague. J’ai marché de chez moi jusqu’à l’entreprise… non je l’ai fait malgré la distance. Je ne pouvais pas faire autrement. Je n’ai aucun sous pourtant nous sommes le 24 du mois, je serai obligé de faire ainsi jusqu’au 05 du mois prochain. L’entreprise, ça paie vraiment pas.

 

Je revois ce brave jeune, joli mais transpirant assez à cause de sa manière de marcher sûrement. J’ai eu froid au dos, que devient-on ? avoir des diplômes, être embauché et marcher des kilomètres parce qu’on n’a pas l’argent du taxi ?? C’est quelle vie ça ? Je me demande si c’est un message que la nature veut me passer, bref, je suis confuse.

 

J’arrive toute essoufflée devant la petite boutique d’Elvire, elle me donne un petit jus de citron qui me donne assez de force.

 

-Elvire : dis moi tout…

 

-Moi : le directeur là veut me tuer Vivi, il veut empêcher mon étoile de briller.

 

-Elvire : tu sais que je n’aime pas quand tu fais ça, vas droit au but..

 

-Moi : je ne peux jamais accepter sa proposition.

 

-Elvire : okay, tu ne vas pas accepter mais dis-moi ce que s’est.

 

-Moi : je reviendrai tout te rencontrer. Il me faut du temps pour digérer ces quelques mots de la part de mon directeur.

 

-Elvire : à vrai dire, j’aimerais tout écouter mais prends ton temps. Demain on va en discuter et surtout ne prends pas de décision sans moi, prenons ça ensemble stp.

 

-Moi : oui oui, on le fera ensemble.

 

-Elvire : pour le meilleur et le pire n’est-ce pas ?

 

-Moi : oh que si, toujours !

 

Je suis parti sur le champ parce que je ne voulais rien dire à Elvire, du moins pour le moment. Quand je suis rentrée, mon appareil sonna, c’était le directeur :

 

-lui : j’espère que tu es bien rentrée

 

-Moi : c’est le cas. Merci

 

-Lui : penses bien à ma proposition, tu n’as pas besoin de demander l’avis des autres. Vis ta vie comme tu peux.

 

-Moi : d’accord.

 

-Lui : la vie devient de plus en plus difficile. En s’accrochant aux gens qui sont aussi pauvres que toi, tu ne pourras pas réussir. Faudra que tu lies de nouvelles relations avec de grandes personnalités et ce sera juste en acceptant ma proposition.

 

-Moi : j’ai compris Monsieur, merci.

 

Il a raccroché. « Proposition de merde. » me dit ma conscience.

 

 

 

DIALLO

 

Déjà à 18h, j’étais chez M. Julien dans ma toute mignonne tenue, il n’était pas encore de retour mais son fils était là, on a papoté plusieurs minutes.

 

-Stéphane : alors avez-vous des enfants ?

 

-Moi : oui, oui. J’ai une fille

 

-Stéphane : en quelle classe ?

 

-Moi : elle vient d’avoir sa licence en ressources humaines

 

-Stéphane : waouh félicitations à elle. J’espère que vous allez me le présenter un jour.

 

-Moi : oui oui, ça se fera.

 

-Stéphane : a-t-elle déjà commencé par travailler ?

 

-Moi : non, non. Elle en cherche toujours.

 

-Stéphane : les problèmes de travail dans ce pays. En tout cas, laissez-moi la rencontrer papa Diallo. Peut-être il y aura une opportunité à saisir.

 

-Moi : je serai vraiment ravie si vous lui trouvez quelque chose à faire donc je vais lui parler de votre rencontre.

 

-Stéphane : d’accord. Ce qui est sûre, il n’est pas tard pour elle. Je promets de lui trouver quelque chose. Il suffit juste qu’elle soit compétente et humble.

 

-Moi : elle l’est, elle l’est. La compétence, c’est son nom.

 

Une joie entra dans mon cœur. Je connais Stéphane il y a juste deux jours mais je sais qu’il va faire comme il a dit.

 

 

 

CYNTHIA

 

J’étais tranquillement à la maison quand ma maman est revenue. Après avoir fait semblant de discuter sur deux ou trois trucs avec elle, je lui pose une question ou des questions agaçantes ;

 

-Moi : tu me disais souvent que tu as arrêté les classes quand tu étais au CM2

 

-Da-féli(en épluchant l’igame) : oui oui c’est le cas.

 

-Moi : comment tu as su gérer ta vie ? Comment tu as su te lancer dans le commerce sans personne ?

 

-Da-féli : personne comment ? ta grand-mère était toujours vivante et c’est elle qui m’a aidé à devenir ce que je suis actuellement.

 

-Moi : tu n’as jamais eu de propositions indécentes ?

 

-Da-féli : tu englobes quoi dans proposition indécente ?

 

-Moi : maman !!

 

-Da-féli : bon oui, tant que tu es fille et surtout belle..

 

-Moi : toutes les femmes sont belles

 

-Da-féli : je le sais mais toi encore plus. Dès que c’est le cas, tu seras toujours convoitée. C’est à toi de tenir ferme. Il faut avoir des principes et surtout les respecter, c’est ce qui est important.

 

-Moi : tu as été vierge jusqu’au mariage ?

 

-Da-féli : tu n’es plus vierge ? (Silence absolu) tu sais, si tu as quelque chose, tu peux m’en parler, je suis ta mère et rien ne va changer cela.

 

-Moi : maman, je suis vierge. Si je pose des questions, c’est juste pour en savoir plus.

 

-Da-féli : je souhaite que tu le sois jusqu’au mariage. Ta vie est importante, ta personnalité l’est aussi. Ne les gâche pas à cause de quoi que ce soit, tu seras dans plusieurs conflits mais c’est à toi de te décider, je ne peux pas le faire à ta place. Je sais la fille que tu es, tu peux être géniale, merveilleuse et douce quand tu le veux. Inscris cette personnalité en toi. Il faut qu’autour de toi, on sache que tu n’es pas n’importe qui, fais-leur voir que tu es une fille de principe et de valeur. Ne laisse pas les petites choses te conduire là où il ne faut pas. Quand tu vas réussir, je voudrais qu’on dise que du bien de toi, que tes amis qui te dénigrent t’acclament, qu’ils s’inclinent devant toi parce que tu as su faire par voie propre et non par un autre moyen.

 

-Moi : tu parles comme si tu es en moi..

 

-Da-féli : je suis plus âgée que toi et je parle en connaissance de cause. Un grand n’est jamais un petit.

 

Des flashs de mon entretien avec le directeur me viennent à l’esprit. Les liasses de billets d’argent, 500.000f par semaine, ce que je dois faire avant de l’avoir.

 

-Da-féli : tu pleures ??

 

-Moi : non, non..

 

J’essuie quand même mes larmes. Oui, je pleurais sans savoir. Quelle vie ! elle est si cruelle envers moi.

 

-Da-féli : je sais que tu sais déjà ce que tu dois faire et ce que tu ne dois pas faire alors fais le bon choix.

 

Je me lève et je vais dans ma chambre, je pleure de plus belle. Je ne veux pas blesser ma dignité ni ma fierté mais ma famille et moi avions besoin d’argent. Je suis dans un dilemme

 

   CYNHTIA

 

A vrai dire, ma mère n’a pas parlé dans le vide. Chaque mot faisait son mouvement dans ma tête. Je sais aussi qu’elle connait beaucoup de choses mais il faut aussi que je fasse quelque chose pour elle et pour mon père, si elle ne va pas au marché, personne ne mangera le soir. Tout cela doit cesser.

 

Bien je sois touchée par tout ce qu’elle a dit, je prendrai quand même la meilleure des décisions en tenant compte de mes choix. Je le dis toujours, personne ne le fera à ma place, j’ai une famille à nourrir, je dois faire plus qu’eux.

 

Je dors cette nuit ci en étant toute inquiète, en pensant à tout ce que j’ai traversé depuis toute petite jusqu’ici. En première année déjà, je me souviens des mots de mon directeur à mon endroit quand je partis payer une partie de mon écolage.

 

 

 

#FLASH-BACK

 

-Moi : bonjour Monsieur. S’il vous plait, je suis venue payer une partie de mes frais scolaires.

 

-DG Christophe : combien ?

 

-Moi : 45000f

 

-DG Christophe : quarante combien ?? Non mais c’est comme cela qu’on paie un écolage ? Dans 525.000f, c’est seulement 45.000f tu veux payer ?? Qui t’a forcé à venir dans cette université ? Il faut savoir faire avec ce qu’on a non ? N’Y a-t-il pas des universités officielles à fréquenter.

 

-Kennedy (voulant aussi payer) : tout le monde veut fréquenter la prestigieuse université.

 

-DG Christophe : 45000f, c’est petit. Il faut ajouter quelque chose sinon tu seras renvoyée demain, ce sont les ordres.

 

J’étais en ce moment là épuisée, dépourvue de joie et d’amour pour ce directeur, j’étais perdue, je regardais que dans le vide parce que je sais qu’à la maison, on n’a même pas un franc à ajouter. Je vois quand même Kennedy sortir une enveloppe.

 

-Kennedy : y a tout dedans Monsieur, les 525.000f sont dedans avec 50.000 de surplus, c’est papa qui vous le donne pour le travail que vous effectuez.

 

-DG Christophe : voilà, c’est ce qu’on appelle un vrai étudiant.

 

Je vois Kennedy me lorgner et sortir de la salle

 

-DG : mademoiselle, on a déjà tout dit.

 

-Moi : s’il vous plait monsieur…

 

-DG Christophe (en tapant du poing sur la table) : NON !!!

 

Je sors avec mes yeux tous mouillés. Le pire, c’est que je retrouve Kennedy dehors parlant de moi à ses amis, eux tous se moquèrent…

 

-Christelle : le rêve est toujours permis pour les pauvres…

 

Ces gens qui ont le même âge que moi et qui me dénigrent de cette manière… mes larmes coulèrent encore plus. C’est de là je me suis juré que j’aurai de l’argent. Mes enfants ne vont pas souffrir comme moi.

 

Je suis resté 3 semaines, 3 bonnes semaines à la maison avant de trouver la somme qu’il faut et ces trois semaines ont été les pires de ma vie.

 

#FIN-FLASH-BACK

 

 

 

Ces trois semaines ont été les pires de ma vie jusqu’à ce moment de ma vie, cette nuit. Quand tout le monde est en train de dormir, moi je pense à mon avenir, à comment ce sera, à mes enfants, à mon couple. Serait-ce comme pour mes parents ou ça va changer ? Si je veux que ça change, je dois aussi agir. Je ne sais pas quand je tombai dans les mains de morphées.

 

 

 

Le lendemain…

 

Papa était de retour avant mon réveil mais il était dans sa chambre, je ne voulais pas le déranger ; d’ailleurs, je ne sais pas si j’ai quelque chose à lui dire. Je fais un petit sac et je pars chez Elvire en prenant soin de laisser un mot à mon père.

 

De chez moi à la boutique d’Elvire, c’est rien du tout. Du coup, quelques minutes plus tard je suis arrivée. Après les formalités, on rentre dans quelques petits détails.

 

-Moi : et ta formation, c’est pour quand ?

 

-Elvire : juste dans deux semaines

 

-Moi : et la boutique ??

 

-Elvire : je vais laisser maman gérer.

 

-Moi : ah d’accord, fille intelligente.

 

-Elvire : laisses l’affaire. Tu devrais me parler de quelque chose non ? Je pense que tu es déjà calmée pour me tout me raconter.

 

-Moi : oui, je vais te le raconter parce que tu es une amie de confiance, celle que je peux appeler à n’importe quelle heure de la nuit…

 

-Elvire : laisses les compliments. Ce n’est pour rien qu’il faut avoir des amis, c’est pour ces genres de situations.

 

-Moi : le directeur m’a fait une proposition qui a dépassé mon esprit, je continue de réfléchir.

 

-Elvire : j’écoute.

 

-Moi : il a dit que je pourrais gagner 500.000f par semaine

 

-Elvire : 500.000f même même ??

 

-Moi : oui, oui

 

-Elvire : et tu dois faire quoi en retour ? Parce qu’on sait tous que ça ne sera pas simple comme cela. Après tout, le salaire ne se fixe pas aussi sur une semaine, ça devrait normalement être sur un mois.

 

-Moi : il m’a proposé…, au fait…

 

-Elvire : t’a-t-il demandé de coucher avec lui ?

 

-Moi : c’est plus gros que ça. Je coucherai avec des gens, pas lui-même. Une nouvelle personne chaque jour sauf le dimanche

 

-Elvire (surprise) : quoi ?? Donc 6hommes chaque semaine ?? Pour gagner 500.000f

 

-Moi : oui, oui

 

-Elvire : maintenant, dis-moi ; tu disais que tu réfléchissais, tu réfléchis par rapport à quoi ?

 

-Moi : si je devais accepter ou pas ?

 

-Elvire : tu es malade ? Cynthia ?? c’est toi ou c’est quelqu’un d’autre ?? La Cynthia que je connais ne va même pas réfléchir, tu devrais donner comme réponse un « NON » catégorique. Tu étais tellement préoccupée hier, je me suis posée des questions mais je ne trouvais pas ce qui te dérangeait. Tu sais, je sais qu’en ce moment, la vie n’est pas comme tu veux mais persévères. Tu ne veux quand même pas me dire que tu vas accepter la proposition du directeur après avoir réfléchi.

 

-Moi : je pensais tout juste

 

-Elvire : ah non, non ma belle ; ça ne m’a pas plu. Les conditions ne sont pas favorables pour nous, je le sais mais vendre ton corps pour de l’argent, à quoi ça va servir ? Tu n’aimerais plus avoir assez d’enfants, tu n’aimerais plus voir tes enfants jouer dans ta cour ? Tu veux arrêter de faire briller ton étoile ? si tu refuses cette proposition, personne, je dis bien que personne ne peut te forcer, c’est impossible. Tu ne dois penser à rien. Considère que tu n’as pas encore de boulot parce que ce qu’on t’a proposé là, c’est de la maltraitance, c’est de l’embêtement envers ton être.

 

-Moi : hum

 

-Elvire : oui, chérie. On ne se lève pas un jour pour devenir milliardaire mais c’est ce que tu veux tenter ça. Les bonnes choses arrivent toujours à ceux qui savent attendre, il faut espérer.

 

-Moi : jusqu’à quand ?

 

-Elvire : jusqu’au jour j. Tu ne connais pas les œuvres de Dieu, donc wait dear, wait (attends chérie, attends). Depuis quand tu as perdu la confiance en toi-même ? Depuis quand ? Ressaisis-toi, tu as tout en toi chérie : tes talents, tes habiletés, tout Cynthia, tu as tout en toi. Tu dois savoir diriger ta propre vie pour inspirer tes proches. Ces problèmes dans lesquels tu passes feront de toi « la meilleure femme » de demain. Tu vas adorer celle que tu seras, je te l’assure. Essaie de faire sans le directeur, appelles le, dis-lui que tu ne veux pas parce que tu aspires devenir une bonne personne pour ton environnement.

 

-Moi : merci beaucoup la mère pour cette force que tu viens de me donner. J’irai tout dire au directeur.

 

Je me lève en même temps et je prends mon sac..

 

-Elvire : ah, non, non. Si tu l’appelles, c’est pas mieux ??

 

-Moi : il pensera sûrement que je suis en train de blaguer.

 

-Elvire : là, je t’accompagne.

 

-Moi : non, non. Tu n’as vraiment rien à craindre.

 

-Elvire : fais-moi signe à ton retour

 

-Moi : oui oui, je le ferai.

 

Je sors de chez Elvire la tête chaude, oui, j’ai vraiment envie de devenir une meilleure femme, j’aimerais moi aussi être comme ma mère, être comme Elvire.

 

A SUIVRE


Ecrit par Esther AMETONOU

 

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